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Libération
Reportage

Les Serbes malvenus au Kosovo. Les réfugiés de Krajina refusent d'aller dans cette province hostile.

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publié le 21 août 1995 à 7h18

Pristina, envoyé spécial

Arrivés il y a quelques heures après un voyage exténuant d'une quinzaine de jours, la plupart des réfugiés serbes de Krajina, logés dans la grande salle sportive de Pristina, sont encore en état de choc et réalisent à peine qu'ils sont au Kosovo. Ils sont déjà 2.000 à avoir rejoint cette province du sud de la Serbie, dont la population est dans sa grande majorité albanaise.

Tous, lorsqu'ils ont pris le train vendredi dernier de Sremska Mitrovica, en Serbie, croyaient qu'on les amenait à Cacak au sud du pays. Ce n'est qu'en arrivant à la gare de Pristina, chef-lieu du Kosovo, que ce fut le choc. «On était ébahis d'être au Kosovo. On ne connaît personne ici. On est si loin de chez nous.» Certains sont prostrés, d'autres pleurent, la plupart sont épuisés, le regard vide. Un haut-parleur annonce que de la nourriture pour bébés et des chaussettes viennent d'arriver. Dragica Tomic, une grand-mère, sanglote: «Nous avions en Krajina notre maison, une vache, des poulets, des cochons... Nous avons tout perdu, dites-moi si mon fils est vivant!» Sans un dinar, elle a fui sa maison près de Knin, l'ancien chef-lieu de la Krajina, avec ses trois petits-enfants et sa belle-fille. D'abord à pied, puis sur la remorque d'un tracteur, enfin en camion au travers de la Bosnie jusqu'à la frontière serbe. Sur leur chemin, il ont vu une colonne de réfugiés bombardée par les forces croates.

La plupart des réfugiés veulent retourner au nord de la Serbie, où ils ont de la famille,