Sarajevo, envoyé spécial
Le soir, avec les dernières lueurs du soleil, derrière les collines, Sarajevo plonge brusquement dans les ténèbres. A 21 heures, le couvre-feu coïncide en effet avec la tombée de la nuit. Alors, dans les rues désertes et noires apparaissent seulement de pâles reflets bleutés à travers de rares fenêtres, comme autant de privilèges. Toutefois, sans la loi martiale, la ville ne s'illuminerait pas d'avantage. Jamais la production électrique n'a été aussi faible, même lors du cauchemardesque premier hiver de la guerre.
C'est en mai dernier que la tension baissa à un niveau dramatique. L'aéroport venait de fermer, les routes étaient bloquées. Les Sarajeviens remédiaient couci-couça à ce blocus déjà connu grâce à un tunnel souterrain. La rupture d'électricité et de gaz survint alors, à laquelle ils ne s'étaient pas préparés. «Dans les pires moments de la guerre, la coordination sur la distribution d'énergie, entre les Serbes et nous, avait toujours fonctionné, explique Said Jamakovic, chef des services d'urbanisme de la municipalité. Certes, les Serbes tournaient les robinets pour négocier de temps à autre, mais pas très longtemps car nous sommes dépendants des mêmes réseaux.»
Plus d'électricité, plus de gaz: plus d'eau non plus, car sa distribution exige beaucoup d'énergie. L'heure est donc au système D. Un câble souterrain est tiré à proximité de la piste d'Igman. Les générateurs de bric et de broc tournent à plein régime: des lampes se branchent sur des mo