Brasilia, envoyé spécial
Dans la savane poussiéreuse du Planalto, le plateau central brésilien, se dresse un drôle de temple dont le frontispice à colonnes est comme un écho exotique de la Rome antique. A la fin de la cérémonie, devant l'autel où trône une croix dorée enchâssée dans une grosse boule verte, les «médiums passistes» forment un couloir d'aubes blanches dans lequel s'engage le flot recueilli des fidèles. Sous une icône du Christ, des claquements de doigts rythment alors une gestuelle compliquée, censée «soulager les plexus solaires de leur charge négative». Passes magnétiques et signes de croix font bon ménage à la cité éclectique, «premier sanctuaire essénien des Amériques» à 70 km de Brasilia et communauté pionnière de la prolifique mouvance mystico-ésotérique qui gravite autour de la capitale fédérale du Brésil.
Fruit partagé d'un vague agnostique (l'urbaniste Lucio Costa) et d'un adorateur déclaré de Staline (l'architecte Oscar Niemeyer), Brasilia, célèbre pour la rigueur monumentale de ses lignes, aspire désormais, sous les auspices du secrétariat au tourisme, au statut de Mecque planétaire du courant new age. Economiste repenti, venu il y a huit ans «se libérer de la dictature de l'argent», Ricardo Gomes da Silva, alias «frère Myron», 37 ans, «maire adjoint» de la cité éclectique qui abrite quelque six cents adeptes, avoue dans un sourire qu'il «ne maîtrise pas encore l'ensemble de la doctrine» enseignée. Il est par contre persuadé que «sans la base d'appui é