Le mont des Caroubiers porte mal son nom. Il n'y pousse plus que des eucalyptus et quelques pins. Il domine le détroit de Gibraltar et, vers le sud-ouest, une mosquée et les premières maisons marocaines, comme à portée de main. Mais la garde civile empêche le passage. Elle surveille, ici à Ceuta, enclave espagnole en Afrique, l'extrême frontière sud de l'Europe: huit kilomètres et demi d'un relief tourmenté qui culmine, en haut du Djebel Chinder, à 248 m. Vendredi, l'armée espagnole s'est déployée dans ces vallons pour fermer la frontière à l'immigration clandestine. Les appelés installent ces jours-ci, tout au long des 8,5 kilomètres, barbelés, et projecteurs. Cent quatorze gardes civils, des véhicules tout-terrain et un hélicoptère sont venus renforcer la surveillance. «Un mur de la honte», a lancé, à Madrid, un député communiste. La mesure est provisoire. Les barbelés ne seront plus nécessaires quand seront terminés, dans moins d'un an, les travaux qui doivent permettre de colmater totalement cette frontière: une voie où circuleront les véhicules de la garde civile, et qui sera truffée de systèmes d'alarme à infrarouge et de caméras.
Le détroit de Gibraltar, et Ceuta en particulier, est un important point de passage des immigrés clandestins venus d'Afrique noire, de Turquie, et d'Algérie parfois. Lundi 16 encore, la garde civile en rejetait trente-six, mais le flux est continu et s'est accéléré depuis 1993. Une fois franchie la «barrière» de monts et vaux, aidés par des pa