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Libération
Reportage

Le syndrome Viêt-nam ravage la Serbie. Traumatisés par la guerre, les combattants ne parviennent pas à se réinsérer.

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publié le 26 octobre 1995 à 8h56

Belgrade, envoyé spécial

Mihaïlo, Zoran, Zeljko et tant d'autres sont devenus la mauvaise conscience de la Serbie. Ces anciens combattants, chargés de leurs traumatismes et parfois de leurs crimes, sont le rappel constant d'un chapitre que la société serbe voudrait occulter. «Les vétérans de la guerre ne rentrent plus en héros, mais en criminels», constate le psychiatre Alexandre Jovanovic. Incapables de se réinsérer, certains plongent dans l'alcool et la violence. D'autres retournent sur la ligne de front jusqu'à ce que mort s'ensuive. «Des suicides passifs», constatent les thérapeutes.

Le 3 janvier 1993, Slavoljub Djurdjic, de l'Institut de psychiatrie, reçoit un coup de téléphone de la femme de l'un de ses patients, Mihaïlo: «Il tenait une bombe dans la main droite et une pierre dans la main gauche, prêt à l'utiliser comme détonateur. Il voulait se faire sauter avec sa famille. Il n'avait pas d'argent pour acheter des antidépresseurs. Il a téléphoné à son frère en Allemagne, mais celui-ci lui a dit qu'il n'était pas le Père Noël. Alors il est devenu violent.» Après cinq heures de discussion, Slavoljub Djurdjic parviendra à convaincre Mihaïlo de se rendre contre la promesse qu'il ne serait pas incarcéré. Un cas typique du «syndrome posttraumatique» (le terme médical du syndrome du Viêt-nam). Un mélange de profondes dépressions et de crises d'agressivité, marqué souvent par des douleurs psychosomatiques, des angoisses, des insomnies, des cauchemars et surtout une terrible ab