La Havane, de notre correspondant
Il est 8 heures sonnantes au coin de l'Avenida de los Presidentes et de la rue Linea, juste en face du ministère des Relations extérieures, dans le quartier du Vedado. A quelques mètres de là, derrière un vague grillage à moitié détruit, une centaines de pioneros de l'école primaire, short et jupe bordeaux, chemisette blanche et foulard bleu ou rouge accroché au cou, sont alignés en formation dans la cour de l'école comme un bataillon de préparation militaire. La maîtresse les encourage d'un geste à hausser les choeurs de l'hymne national qu'ils chantent joyeusement pour couvrir le vacarme de cris et d'insultes venant de l'attroupement voisin. A la fin, comme un seul homme, petites filles et petits garçons portent la main tendue au front, dans un salut impeccable, et crient comme l'ont fait tous les matins, tous les pioneros de l'île depuis presque trois décennies: «Pioneros por el comunismo seremos como el Che!» («Pionniers, pour le communisme, nous serons comme le Che».) Depuis la mort d'Ernesto Guevara, des millions d'écoliers cubains ont lancé ce cri avant d'ouvrir leurs manuels de classe et de retrouver l'effigie du superhéros à chaque coin de page de leurs livres de lecture, d'histoire ou d'instruction civique. Certains adolescents ont même parfois du mal à se souvenir que le Che était argentin tant il fait partie intégrante de leur bagage mental.
Cette empreinte quasi génétique que portent les Cubains de moins de 30 ans se retrouve étra