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Libération
Reportage

Graskop va enterrer l'apartheid dans les urnesLes élections locales risquent de bouleverser cette bourgade conservatrice du Transvaal.

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publié le 1er novembre 1995 à 10h41

Graskop, envoyé spécial

Quand Kemy Mashego se rappelle la cérémonie du Harbour Day, qui se tient tous les mois de septembre en Afrique du Sud, les larmes lui montent aux yeux. A cette occasion, tous les conseils municipaux du pays se réunissent sur la grand-place des villages. Les députés, chacun à leur tour, plantent un arbre sous les applaudissements de leurs concitoyens. A Graskop, petite ville du Transvaal-Est ­aujourd'hui baptisée Mpumalango­, pour la première fois de son histoire, figurait un Noir parmi les dix conseillers municipaux blancs, pour le Harbour Day. Kemy Mashego a été intégré sur pression de Pretoria au conseil municipal de transition en janvier, une conséquence de l'élection de Nelson Mandela à la présidence, qui veut que l'accès aux institutions soient offertes aux Noirs. «Lorsque je me suis rendu à la fête, mon coeur battait de joie, raconte Kemy. Tous ces conseillers blancs ont reçu un arbre. Mais pas moi. On m'a délibérément ignoré. J'ai dû applaudir mes soi-disant collègues. J'aurais tant voulu avoir mon arbre, le premier planté par un Noir à Graskop. J'en aurais pleuré.»

«Graskop, fenêtre sur le Transvaal», est-il inscrit sur le grand panneau de bienvenue à l'entrée de la bourgade. En fait, c'est plutôt de lucarne qu'il faudrait parler, tant Graskop, situé au coeur du pays afrikaner, est restée conservatrice. Ici, dix-huit mois après l'élection du premier président noir à la tête de l'Afrique du Sud, rien n'a changé. Au sommet de la colline, trône la