L'odeur du caoutchouc carbonisé flotte à nouveau en Haïti. A un mois
de la date prévue pour le premier tour de l'élection présidentielle, des groupes se réclamant de Jean-Bertrand Aristide ont érigé des barrages de pneus enflammés le mode de contestation traditionnel à Port-au-Prince et dans les principales villes du pays. Ils réclament le désarmement des anciens «attachés» et «tontons macoutes» qu'ils accusent de vouloir rallumer la violence politique, et exigent le maintien au pouvoir d'Aristide pendant une période supplémentaire de trois ans, pour compenser l'exil qu'il a subi après le putsch du 30 septembre 1991.
Ce nouvel accès de fièvre, dont le bilan s'élevait lundi soir à au moins 7 morts et 10 blessés, a été déclenché par l'assassinat, mardi dernier, d'un député du parti présidentiel (Lavalas), Jean-Hubert Feuillé, abattu dans sa voiture par un escadron de la mort. Un autre député «Lavalas», Gabriel Fortuné, a été blessé dans le même attentat. Feuillé était un cousin du président Aristide et un ancien membre de sa sécurité rapprochée.
Les premières violences ont éclaté mercredi aux Cayes, la ville du sud dont il était issu. Un présumé néoduvaliériste, Yves Estinval, y a été bastonné à mort, et dix-huit maisons incendiées ou saccagées avant qu'un contingent de Casques bleus du Caricom (pays de la Caraïbe anglophone) ne rétablisse le calme avec l'aide de la police nationale.
Le chef de l'État a indirectement relancé l'agitation samedi quand, visiblement sous le coup d