Zurich, envoyé spécial
«Sugar?», susurre un revendeur sur la Langstrasse, l'une des rues traditionnelles de la prostitution à Zurich. Quelques mètres plus loin, un toxico achète sa dose d'héroïne. Une voiture de police file à toute allure. L'heure est aux deals furtifs. Depuis la fermeture de la scène ouverte de la drogue au Letten, en février, les policiers ont ordre de sévir. Vêtus de bleus de travail, 150 hommes patrouillent dans les rues chaudes. En huit mois, ils ont procédé à 3 500 arrestations. Chassés du Letten, les dealers se sont déplacés 500 mètres plus loin, près de la Langstrasse. «C'est une guerre de mouvement, commente un consommateur dans un bistrot, flics et dealers se battent pour le contrôle du 4e arrondissement.»
L'épreuve de force a commencé en février, lorsque le maire socialiste de Zurich, Joseph Esterman, a décidé d'en finir avec le plus grand supermarché de la drogue au monde, en plein coeur de la capitale financière suisse. Avec 4 000 toxicomanes dans ses grands jours, des junkies se shootant au vu et au su de tous, des dealers vendant l'héroïne presque à la criée, à quelques pas des établissements bancaires de la Bahnofstrasse, le Letten était devenu ingérable, politiquement inacceptable et socialement explosif, attirant les toxicomanes de toute la Suisse, mais aussi d'Europe. De quoi ternir la réputation de Zurich et faire le lit de la droite populiste.
Après trente ans de politique en zigzag, alternant répression et libéralisme, Zurich aurait-elle e