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Libération

L'Espagne amnésique gomme la mort de FrancoDe la disparition du dictateur, les Espagnols ont surtout gardé le souvenir du réveil démocratique.

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publié le 20 novembre 1995 à 10h07

Madrid,

de notre correspondant Franco est mort il y a vingt ans, le 20 novembre 1975. L'Espagne ne fête pas cet anniversaire. Seuls quelques milliers de nostalgiques se sont retrouvés hier, au cri de «Arriba España!», pour tenter de réveiller le fantôme du dictateur, devant l'unique statue qui subsiste à Madrid. Le triste sire retombera donc dans l'oubli jusqu'à l'année prochaine. Depuis 1975, l'extrême droite, tous groupuscules confondus, n'a jamais dépassé les 2% aux élections.

Après quarante ans de dictature nationale catholique issue d'une guerre civile, l'Espagne semble définitivement vaccinée. «S'il y a un héritage du franquisme, explique Joaquin Arango, président du Centre de recherches sociologiques, c'est un héritage a contrario, fondé sur le rejet. Dans nos enquêtes, Franco est associée à autoritarisme, cruauté, fascisme.» Si la grande majorité des Espagnols aiment aujourd'hui se définir eux-mêmes de «centre gauche», c'est en grande partie dû au souvenir de la chape de plomb de la dictature Mais les Espagnols ont bien quelque chose à célébrer: le 20 novembre, c'est moins la mort de l'ancien chef de l'Etat que le début de la transition vers la démocratie, une succession d'avancées institutionnelles et de négociations politiques qui devait conduire, contre le voeu du dictateur, mais pacifiquement, à la Constitution de 1978, à la monarchie parlementaire en vigueur. Suppléments hebdomadaires dans les principaux journaux, profusions de livres historiques, dont certains s