Billings (Montana), envoyé spécial
Le shérif me dit que je devrais m'habituer. D'après lui, c'est ainsi qu'ici va la vie. Mais, je suis désolée, j'ai des enfants et j'ai peur.» Martha Bethel, 41 ans, juge unique du petit tribunal de Hamilton, refuse de baisser les bras. Et raconte, à n'en plus finir, son histoire. Tout a commencé par la condamnation d'un chauffard qui circulait sans plaque d'immatriculation. Depuis, elle a été suivie chez elle la nuit, assaillie de menaces de mort, et inondée de courrier haineux venus des quatre coins des Etats-Unis. La justice du Texas, en juin, lui a même appris que quelqu'un a été payé pour l'abattre.
Le chauffard était membre d'un groupe extrémiste local, les Freemen (hommes libres), des rebelles marginaux qui se recrutent dans les régions isolées des Etats de l'Ouest (du Montana à l'Idaho ou à l'Arizona). Ils affirment que leurs droits de citoyens «souverains» les placent au-dessus des lois et des juges. Ils se prévalent de la Constitution des Etats-Unis, dont ils font une lecture sélective: ils se battent pour le deuxième amendement (droit au port d'arme) mais veulent réserver les droits civiques et les fonctions publiques aux seuls hommes blancs «caucasiens».
Le phénomène remonte à la crise agricole des années 80, quand des fermiers, ne pouvant faire face à leurs échéances, s'en sont pris à l'Etat fédéral. Mais, en dix ans, le discours antifédéral et anti-impôts a cédé la place à des appels à la résistance armée contre les agents fé