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Libération
Reportage

A Sarajevo, les soldats français attendent les Américains. Ils s'interrogent sur la mission qui leur sera confiée par l'Otan. Et trouvent que le rôle de la France a été sous-estimé.

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publié le 16 décembre 1995 à 11h13

Sarajevo, envoyé spécial

Quatre-vingts centimètres de neige sont tombés dans la nuit, et les trente hommes du lieutenant Jean-Michel Pascal, 29 ans, se préparent à passer un hiver glacé dans les frimas et les congères du mont Igman, qui surplombe Sarajevo; l'un joue les terrassiers, l'autre se bat contre une électricité problématique, d'autres encore scient, clouent et maçonnent pour améliorer des conditions de vie dignes des tranchées de Verdun. Le poste de Brezobaca, qu'ils occupent à 1.070 mètres d'altitude, est à 50 mètres des premiers combattants serbes, et les soldats bosniaques sont de l'autre côté de la route. Les prédécesseurs de ces fantassins du 92e d'infanterie de Clermont-Ferrand, il y a quelques mois, furent allégrement canardés par les deux camps. Mais, aujourd'hui, les choses sont ­ un peu ­ rentrées dans l'ordre.

Le jeune officier résume sa mission en peu de mots: «Empêcher toute action de violence d'une partie envers l'autre.» Avec ses quatre véhicules de l'avant-blindé (VAB) armés de mitrailleuses de 12,7 mm, il assure également l'escorte des convois en direction de Sarajevo. Enfin, un jour auprès des hommes de la brigade serbe qui jouxte son poste et le lendemain auprès de leurs ennemis d'en face, il va aux nouvelles, «interroge les chefs ou les soldats», cherche à percer les intentions de chacun: «J'ai vu les Serbes il y a deux jours. Avec les soldats bosniaques, les rapports sont très courtois. Plus francs, peut-être, avec les Serbes, qui sont plus milita