Vladivostok, envoyé spécial
En pantoufles dans son salon glacial, sans plus prêter attention aux incessantes coupures de courant, Viktor Tcheriebkov s'applique à diriger sa croisade. Maire déchu de Vladivostok, déposé manu militari par l'administration régionale avec la complicité de la justice locale, il se démène comme un beau diable pour faire reconnaître ses droits. Et à défaut de pouvoir réintégrer son fauteuil, ce vieux démocrate à la soixantaine fatigué brigue un siège de député aux législatives de dimanche, trimant jour et nuit, noyé entre les pétitions, les appels, les tracts.
Autour de lui s'agitent les fidèles. Libéraux de toutes conditions. Des policiers mis sur la touche pour leur attachement à la légalité. Des fonctionnaires de l'hôtel de ville débarqués par son remplaçant, une créature du gouverneur. Des journalistes licenciés, coupables d'avoir critiqué le nouveau pouvoir imposé par Moscou pour tenir les «marches maritimes», à sept heures de vol, trois jours de train et six fuseaux horaires de la capitale, sur les bords de l'océan Pacifique. Aucun ne ménage sa peine. Pour eux, le cas est exemplaire. Et ces démocrates en ont fait leur cheval de bataille, bien décidés à dénoncer l'arbitraire qui, dans les provinces, place les proconsuls nommés par le Kremlin au-dessus des lois du pays comme des représentants élus au suffrage universel.
Batailler contre le gouverneur demande une bonne dose de courage. Le fils du maire a été exclu de son académie militaire puis jeté