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Libération

Les démocrates russes contre l'amnésieDeux ex-dissidents commentent la victoire communiste aux législatives.

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publié le 23 décembre 1995 à 11h01

Moscou,

de notre correspondant Au plus fort de la campagne électorale, un gigantesque panneau barrait l'entrée de l'avenue Lénine à Moscou, lettres blanches sur fond noir, sévère comme un faire-part de décès. «Les 50 millions de victimes de la répression stalinienne n'auraient pas voté pour les communistes», proclamait l'affiche du candidat libéral Boris Fiodorov dans un ultime appel au civisme de ses compatriotes. Las, les incantations démocrates ne font plus recette en Russie. Moins de cinq ans après l'échec du putsch conservateur d'août 1991, de ces immenses manifestations réclamant la dissolution d'un parti ayant monopolisé jusqu'à la moindre parcelle d'espace politique, culturel ou social, près d'un quart des citoyens russes se tournent avec nostalgie vers le passé. Usée par les conséquences économiques des réformes, leur mémoire semble avoir effacé jusqu'au souvenir des pénuries chroniques de ce qu'on appelait alors «la période de stagnation» soviétique pour ne se rappeler que de la «stabilité» générée par l'immobilisme.

Certes, le vote protestataire sanctionne essentiellement le gouvernement de Eltsine. Mais il n'épargne pas les authentiques démocrates, issus pour l'essentiel de la dissidence, rejetés dans un même mouvement pour avoir apporté leur caution morale au processus de réformes mené par le pouvoir. Et l'électrochoc électoral relance plus que jamais le débat chez les orphelins d'Andreï Sakharov, divisés entre la nécessité de construire une alternative idéologiq