Vogosca, envoyé spécial
Dans une aube glaciale, le désert des rues de Vogosca, un faubourg au nord de Sarajevo, pouvait sembler normal. A cette heure pourtant, le cortège de trois autobus rouges de la RATP bosniaque, suivi d'un camion de pompiers rutilant et d'une ambulance repérable à une immense croix rouge, n'a pas manqué de susciter de la curiosité. Au passage des premières maisons, deux flics sont descendus du premier véhicule pour se poster face à un barrage de l'Ifor. Ils portent la vareuse vert olive et la casquette toute neuve de la police nationale bosniaque. Trois cents mètres plus loin, deux autres prennent place sur le péron de la poste.
Ce vendredi matin, un symbolique mais formidable pan du siège de Sarajevo est tombé dans le silence. Pour la première fois depuis le début de la guerre, des policiers bosniaques, musulmans et croates, ont pris pied dans l'un des quartiers de Sarajevo sous contrôle serbe. Un petit attroupement attend bien sûr le convoi dans le square verglacé de la mairie. Une cinquantaine de militaires de l'Ifor, des policiers de seize nationalités, des journalistes transis qui dissimulent par leur nombre trois autres autobus, bleu et blanc, maculés de boue ceux-là, dans lesquels montent des passagers plutôt âgés, tristes, tandis que le chauffeur empile les valises dans les coffres. Le désarroi et la solitude de ces gens dénotent dans l'excitation du moment. Eux, Serbes, s'en vont avant l'arrivée imminente du convoi des policiers bosniaques.
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