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Libération
Enquête

Cette semaine dans «Libération», des sectes en quête d'influence à l'étranger. Aujourd'hui, l'Afrique du Sud. Une Eglise zouloue dans la tourmente du Natal La secte des Shembe est déchirée par la guerre civile et suscite la convoitise des partis politiques.

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publié le 29 mars 1996 à 2h06

Inanda, envoyé spécial

Pieds nus dans l'herbe haute, trois jolies jeunes filles se sont esquivées de la messe et pouffent de rire en réajustant dans de grands gestes ostentatoires le voile blanc censé couvrir leur visage. Elles ont filé par une porte dérobée, réservée aux «vierges» de l'Eglise baptiste de Nazareth, par laquelle elles accèdent à la cérémonie. Un vol de pigeons traverse la vaste église de briques d'Ekuphakameni, quartier général du mouvement, où une cinquantaine de fidèles sont agenouillés sur le sol et chantent des cantiques qui résonnent sous la voûte. Perdue dans une oasis de végétation, la basilique, la plus imposante jamais bâtie en Afrique du Sud par une Eglise africaine, est complètement dépouillée de meubles, images et ornements, tel un hangar industriel vidé de son stock. Seul un coussin blanc posé sur la mosaïque froide semble tenir le rôle d'autel, autour duquel se sont groupés, par sections strictement séparées, les «Shembe», pèlerins de Issaia Shembe, prophète zoulou né au siècle dernier. Selon ses commandements, les hommes, tenant en main une bible en zoulou, sont séparés des femmes mariées, des petites filles et des vierges drapées pudiquement dans leur voile blanc, placées bien à l'écart.

Schisme dans la secte. Au même instant, de l'autre côté de la nationale qui coupe en deux le ghetto noir de Inanda, dans la banlieue de Durban, résonne la cloche qui appelle deux fois par jour d'autres fidèles de l'Eglise. Là se trouve la «seconde Jérusalem» de