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Libération

Commémoration antifrançaise au RwandaDeux ans après le génocide rwandais, Paris est accusé d'avoir «armé les tueurs».

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publié le 8 avril 1996 à 4h30

Gikongoro,

envoyée spéciale Les pluies torrentielles ont dévasté les tribunes, mais la foule est là, bien avant l'heure, piétinant dans la boue sous des parapluies multicolores. Les militaires, en tenues dépareillées, contrôlent les 4X4 et les voitures officielles. Puis les font passer sous une banderole qui fustige en kinyarwanda «la France qui a donné des armes à ceux qui ont tué». Drôle d'accueil pour une commémoration.

Hier, à Murambi, site choisi pour la commémoration officielle du deuxième anniversaire du génocide, le président de la République rwandaise a enfoncé le clou. Murambi appartient à la préfecture de Gikongoro, dans l'ex-zone Turquoise, nom de code de l'intervention militaro-humanitaire de la France. Le public a donc très bien saisi l'allusion quand Pasteur Bizimungu s'est mis à raconter l'histoire de l'éléphant menaçant la fourmi, pour affirmer que, malgré la taille de l'adversaire, la fourmi finit par s'en sortir. Une conclusion en forme d'appel à l'unité nationale contre l'étranger, sans doute destinée à apaiser une population qui supporte de plus en plus mal que les auteurs des massacres de 1994 soient, deux ans plus tard, toujours impunis.

Il y a quelques jours, à Kigali, Claude Dusayidi, conseiller politique du vice-président Paul Kagame, fustigeait lui aussi devant un public fourni le rôle de la communauté internationale, et notamment de la France, dans la planification et l'exécution du génocide. Samedi, le général Kagame lui-même s'est livré devant des