Saint-Pétersbourg, envoyé spécial
Derrière les grilles du fourgon, un poing levé. Et puis ce regard doux, profond, pour son épouse qui ravale ses larmes, pour ses deux filles, secouées de sanglots. La scène s'est déroulée il y a deux semaines devant le tribunal militaire de Saint-Pétersbourg. Les gardes ont vite escamoté leur prisonnier, repoussant sans ménagement la famille. Pour les sbires du Service fédéral de sécurité (FSB), nouvelle mouture du KGB, il n'existe pas crime plus odieux que celui dont est soupçonné le capitaine de vaisseau Alexandre Nikitine: «Haute trahison.» Une accusation ficelée par le contre-espionnage russe pour qui l'engagement d'un officier de marine, même retraité, aux côtés d'une organisation écologiste norvégienne, afin de dénoncer la pollution de Mourmansk par la flotte de guerre nucléaire, s' à de la collecte illégale de renseignements au profit d'une puissance étrangère. Harcèlement. Devant l'entrée miteuse d'une HLM, un groupe de malabars bat la semelle. Au troisième étage, le logement des Nikitine. Le harcèlement n'a pas cessé depuis le 5 octobre 1995. «A 23 heures», précise Tania, son épouse, «ils ont frappé à la porte. Ils ont tout mis sens dessus dessous. Et pas seulement l'appartement. Toute notre vie.» Alexandre est embarqué. «Sans explications. Ils ont fouillé partout, pris tout notre argent, la correspondance de ma fille, nos passeports...» A l'aube, Alexandre est relâché. La guerre des nerfs commence.
Le jour même, à Mourmansk, les b