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Libération
Reportage

Des Russes dans l'eldorado chinoisOuverts à tous les commerces, ils ont colonisé un quartier de Pékin.

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publié le 26 avril 1996 à 3h39

Pékin, de notre correspondante

Calé au fond d'un cyclo-pousse face à une boutique de vêtements, un jeune homme corpulent, de type européen, lance des ordres en russe sur son téléphone portable. Accoudé au timon de bois reliant la carriole au vélo, le tireur de cyclo-pousse l'observe avec un sourire amusé. La scène se déroule dans la «rue des Trésors raffinés» (Yabaolu), l'axe le plus commerçant du «quartier russe» qui s'est développé au centre de la capitale chinoise. «Voilà un an que je travaille sur le marché russe de Pékin», explique Isakov Nisan, l'homme assis dans la carriole, âgé de 22 ans. «Encore un an de cette vie et j'aurai gagné assez d'argent pour rejoindre mes deux frères qui ont déjà émigré au Canada.» Le reste de la famille, d'origine juive, a quitté Moscou pour s'installer en Israël.

Autour du «Temple du Soleil». Au début des années 90, une demi-douzaine de boutiques de soieries se sont établies à l'ouest du «parc du Soleil» (Ritan), près d'un hôtel ou s'arrêtaient occasionnellement quelques voyageurs russes. La normalisation politique entre la Chine et la Russie venait de s'opérer, après trente années de gel des relations entre les deux géants communistes. Aujourd'hui, le quartier russe occupe plusieurs hectares, englobant quatre rues, trois pâtés de maisons et le fameux hôtel du «Temple du Soleil». Les caractères chinois des enseignes ont cédé la place aux lettres cyrilliques. Dans les boutiques, les vendeurs chinois ont adapté leurs marchandises à la demand