Durban, envoyé spécial
«Du courage, ma fille, prenez votre temps. Nous comprenons votre douleur.» L'archevêque et prix Nobel de la paix, Desmond Tutu, laisse passer un moment de silence, tandis qu'en bas de l'estrade, 300 personnes restent pétrifiées. Assise face aux membres de la Commission, Nombuso Majola, une élégante jeune fille de 28 ans, tord ses mains de douleur. Par le micro resté ouvert, on entend ses sanglots étouffés, pauvre petite chose renvoyée à ses cauchemars, puis, courageusement, elle se reprend. «Les policiers, trois Blancs, ont forcé la porte de notre maison. Ils ont traîné mon frère de 19 ans, Austin, dans la cour. Par la fenêtre, j'ai vu qu'ils le battaient à coups de crosse, et le forçait à avouer où il avait caché une arme. Ils ont tiré un premier coup de feu. Il a supplié: Ne me tuez pas! Puis il y a eu deux autres coups de feu. Un des policiers a dit: Ce chien est en train de crever! J'ai couru vers Austin, mais il était déjà mort. Ils ont jeté son corps à l'arrière d'une camionnette et l'ont emmené au poste de police.» Tous les soirs, avant de se coucher, la grand-mère de Nombuso touche du doigt le trou dans le mur qu'a fait au-dessus de son lit l'une les balles qui a traversé le corps de son petit-fils, ce matin du 7 août 1990.
Années de plomb. Comme tous les matins depuis quatre semaines, l'archevêque est allé chercher dans l'arrière-salle les neuf témoins appelés à livrer aujourd'hui leur récit. Nombuso Majola, après avoir prêté serment devant le