Place du Trocadéro, 18h30. Une foule compacte nimbée de fleurs
blanches baigne dans le troisième mouvement de la Quatrième Symphonie de Mahler. Recueillement muet, subitement rompu par des cris de haine. «Salops! On ne dialogue pas avec les terroristes!» Au-dessus des têtes, sur le parvis des Droits-de-l'homme, se dresse une pancarte écrite à la va-vite: «Pourquoi ce mépris, ce manque de dialogue avec le GIA?» Question obscène pour la foule massée derrière les barrières métalliques. «Si ça se trouve, c'est un terroriste qui tient la pancarte!», crie une femme. «Il va encore trancher des gorges. Et pourquoi il aurait pas la bombe et le couteau?!» On exige des policiers qu'ils mettent à bas la pancarte qui disparaît sous les horions...
Incident violent, mais isolé, qui disait bien les nerfs à fleur de peau comme la charge émotionnelle présente mardi soir pour l'hommage rendu aux sept moines trappistes assassinés en Algérie. Une manifestation proposée par François Bayrou, le ministre de l'Éducation nationale, à laquelle partis politiques et syndicats ont emboîté le pas avec l'ensemble des communautés religieuses. Plusieurs milliers de personnes dix mille selon la police se sont agglutinées sur le parvis. Elles étaient encadrées par deux banderoles portant la même phrase, tirée d'une lettre collective écrite par les trappistes assassinés à la suite du massacre, en 1994, de douze Bosniaques sur le territoire algérien: «Si nous nous taisons, les pierres hurleront...» Beaucoup d