Alger, envoyée spéciale
Sur le parvis de Notre-Dame-d'Afrique, une voiture de police rejoint à grand fracas la dizaine de véhicules blindés déjà garés face à la mer. Les hommes descendent, aussitôt entourés par un troupeau de moutons. «Allons-y, on va leur donner du klash (surnom algérien donné à la kalachnikov)», crie le gradé. Tout le monde s'esclaffe, les gamins arrivent en courant, essoufflés: «Et les terroristes, ils vont venir aussi les terroristes?» Au pied de la basilique , coupole dorée sous un ciel gris, cela sent la caserne et la cour de récréation. Quelques heures plus tard, arrivent, déploiement unique en ces lieux, cinq ministres du gouvernement de Liamine Zéroual, cinq évêques de France et d'Algérie, une volée d'ambassadeurs. Et huit cercueils.
Dimanche, en fin d'après-midi, à Notre-Dame-d' Afrique, on a célébré conjointement une messe d'enterrement pour les sept moines assassinés et pour le cardinal Duval, décédé à 92 ans, chez lui à Alger. Alors, sous la coupole, se mêlent les affaires d'Eglise et les affaires d'Etat. Depuis trois jours déjà, l'Algérie politique, toutes couleurs confondues, est venue s'incliner au-dessus du fin profil busqué de monseigneur Duval, curé savoyard, devenu héros algérien depuis son engagement dans la guerre d'indépendance du pays. Retiré depuis 1988, le cardinal restait celui qu'on consulte. Comme le faisaient les ministres ou les pauvres, les moines de Tibehirine avaient eux aussi l'habitude de pousser la porte de chez lui. Ces