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Libération
Enquête

Au Niger, les naufrageurs d'un Etat fantôme. Ruiné par sa classe politique et sous perfusion internationale, un pays attend les élections.

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publié le 18 juin 1996 à 6h44

Niamey, envoyé spécial

Tout le monde connaît le Niger: l'ancienne colonie française enclavée au sud du Sahara fut longtemps une étape obligée du Paris-Dakar et souffre régulièrement de la famine. Certains sauront aussi que Niamey est sa capitale, le franc CFA sa monnaie, garantie par le Trésor français comme les douze autres pays africains de la «zone franc», que l'uranium dont il est le second exportateur mondial constitue sa seule richesse naturelle. Enfin, sans connaître le drapeau ou le nom de l'actuel président du Niger, on a entendu parler de la rébellion des Touaregs, les «hommes bleus» du désert, et peut-être du récent coup d'Etat qui, après six ans de tâtonnement démocratique, a ramené les militaires au pouvoir.

Voilà ce qui semble acquis. En réalité, l'Etat nigérien n'existe plus, ou seulement comme un pavillon de complaisance sur la scène internationale. Envahi par les dunes du Sahara, coupé de la côte par le Nigeria (100 millions d'habitants), son puissant voisin anglophone, le Niger n'est qu'une zone de passage, un lieu d'inextricables contradictions: entre une superficie faisant deux fois et demie celle de la France pour 9 millions d'habitants et un Etat dont le budget équivaut à celui de Clermont-Ferrand; entre les solidarités primaires ­ethniques et religieuses­ d'une population illettrée à 90% et les devoirs civiques d'une démocratie moderne. «Le Niger est un espace aléatoire entre le désert qui descend et le Nigeria qui monte», résume joliment un ambassadeu