La bombe a explosé le 20 mars 1996, au beau milieu de l'après-midi à
la Chambre des communes. Très nerveux, Stephen Dorrell, ministre britannique de la Santé, lit une déclaration décidée, le matin même, en Conseil des ministres: il admet, pour la première fois depuis onze ans, la possibilité d'une contagion à l'homme de l'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB), plus connue sous le nom de «maladie de la vache folle». Le gouvernement, explique Dorrell, vient d'être informé par un comité d'experts qu'«il n'existe toujours aucune preuve scientifique que l'ESB puisse être transmise à l'homme par le boeuf», mais que, néanmoins, l'étude de dix cas de Britanniques récemment décédés d'une forme atypique de la maladie de Creutzfeldt-Jakob suggère que «l'explication la plus probable à ce jour est que ces cas sont liés à un contact avec l'ESB». C'est la phrase qui va déclencher le maelström qui secoue l'UE depuis trois mois.
Dès le 21 mars, la France, où une vingtaine de cas de vaches folles sont apparus depuis cinq ans, décide de suspendre les importations de boeuf britannique. Plusieurs pays lui emboîtent le pas. Londres fustige cette réaction «disproportionnée, inutile et illégale», et, à Bruxelles, un porte-parole de la Commission se range à cet avis. En visite à Paris, Jacques Santer, le président de la Commission, rectifie le tir: l'embargo est «une réaction normale de la France».
A Londres circulent les messages les plus contradictoires. Le gouvernement continue à juger le risque