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Libération

L'Afrique du Sud au temps des sorciersEncouragés par les «devins», les meurtres rituels et les lynchages sont de retour.

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publié le 6 juillet 1996 à 8h16

Pietersburg envoyé spécial

Les numéros des dossiers de justice s'alignent, secs et froids comme de banales contraventions de police. Derrière chacune de ces immatriculations anonymes, médecins légistes et greffiers ont consigné méticuleusement d'insoutenables récits d'horreur, témoignages bien contemporains de rites diaboliques venus d'un autre âge. Ainsi le cas A419/95, «l'Etat contre Samuel Mathebula»: «Le 5 août 1995, Zama Steven Maluleka, un écolier de 14 ans venu rendre visite à sa tante dans le village de Muyexe, disparaît sans laisser de trace. Cinq jours plus tard, un berger découvre son corps mutilé dans les buissons, la tête, les bras et les jambes sciés et accrochés aux branches d'un arbre voisin.» Un suspect, Samuel Mathebula, est arrêté par la police et attend son procès.

Cas CC17/94, «l'Etat contre Edward Nkhumeleni et consorts»: «Edward, 23 ans, et sa femme Lufuno, tous deux au chômage, ont été convaincus par leur tante Tshavhungwe qu'ils deviendraient riches s'ils se procuraient les membres d'une personne vivante. En juin 1994, les trois ont attiré dans le bush une jeune fille seule du village, Nthateni. Ils l'ont forcé à avoir des relations sexuelles avec Edward et lui ont tranché la tête, les membres et le pubis. Les trois ont ensuite récolté les membres arrachés dans un sac en plastique.» Démasqués, Edward et sa tante ont été condamnés à la prison à vie le 23 juin 1995, par la Cour suprême du Venda.

Affaire d'Etat.Douloureuse réalité d'une Afrique du Sud au «