Dans Bujumbura vendredi, à quelques rues de distance et quelques
heures d'écart, deux hommes prétendaient l'un et l'autre diriger le Burundi. D'un côté, Pierre Buyoya, militaire, Tutsi et proclamé président la veille par l'armée, en majorité composée de Tutsis. Au cours d'une conférence de presse, il a expliqué qu'on ne «pouvait pas vraiment appeler cela un putsch». Il assume ses nouvelles fonctions pour sauver le pays «de la descente aux enfers», ces massacres interethniques qui l'endeuillent depuis des années. De l'autre côté, Sylvestre Ntibantunganya, Hutu comme 85% de ses compatriotes et président légalement désigné en septembre 1994. Aiguillonné par des rumeurs de coup d'Etat, Ntibantunganya s'est réfugié depuis mardi dans la résidence de l'ambassadeur des Etats-Unis à Bujumbura. C'est là que, vendredi, il a réaffirmé ne pas vouloir démissionner.
Cette affluence de présidents au Burundi a provoqué un spectre large de réactions au sein de la communauté internationale, où l'indignation se mélange à la tentation de composer. Si l'Allemagne affirme «ne pas soutenir un gouvernement qui a pris le pouvoir par des moyens anticonstitutionnels», Londres appelle plus sobrement «au dialogue» et recommande «d'éviter le recours à la violence». La Belgique, dont le Burundi fit partie du royaume jusqu'en 1962, affirme que «la personnalité du major Buyoya n'est pas la plus mauvaise».
Réuni vendredi à Arusha (Tanzanie), des «experts» des cinq pays voisins du Burundi ont décidé de prolonger