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Libération

Soweto revient sur les blessures de l'apartheid. Les habitants du ghetto noir témoignent devant une commission, des atrocités de la ségrégation.

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publié le 29 juillet 1996 à 7h35

Soweto envoyé spécial

«Ils ont réduit mon fils en bouillie! Ils ont réduit mon enfant en bouillie!» La voix entrecoupée de sanglots de Nobelongu Leballo résonne sous la voûte de la sinistre «cathédrale» Regina Mundi, une église de brique froide. Haut lieu de la résistance noire, au coeur du township de Soweto, Regina Mundi servit entre autre de refuge aux écoliers de 1976, dont le soulèvement fut réprimé dans le sang par la police de l'apartheid. Cette semaine, l'église est devenue, une fois encore, le lieu de tous les souvenirs et les tragédies de Soweto. Pour la première fois, la Commission Vérité et Réconciliation, mise sur pied par le président Nelson Mandela pour faire la lumière sur les violations commises au temps de l'apartheid, s'est arrêtée à Soweto. Et tandis que le cri de douleur de Nobelungu, l'une des innombrables mamans à pleurer l'un de ses enfants, déchire l'assistance, plusieurs spectateurs prennent leur tête entre les mains et pleurent silencieusement. Un pigeon prend son envol sous les néons. «Mama, prenez votre temps, buvez un verre d'eau», dit d'une voix douce l'une des six «commissaires», chargée de mener l'audition.

Comme de nombreuses victimes de l'apartheid, la vieille dame ne demande ni réparation, ni vengeance. Tout ce qu'elle désire, c'est qu'on lui dise pourquoi son fils est mort, qu'elle puisse voir l'endroit où il fut exécuté par la sinistre unité «C-10», un escadron de la mort chargé des basses oeuvres du régime blanc, le 25 novembre 1992. Aprè