Genève de notre correspondant
Joseph Goldblat, spécialiste du désarmement, consultant auprès de l'ONU, enseigne à l'Institut universitaire des hautes études internationales à Genève.
Comment expliquez-vous l'échec de la conférence de Genève?
Depuis le début, les Indiens ont exigé que l'interdiction des essais nucléaires soit liée à un calendrier précis de désarmement des arsenaux atomiques des grandes puissances. New Delhi n'a jamais obtenu satisfaction sur ce point. Dès lors, les gouvernements indiens successifs ont estimé que leur intérêt était de s'opposer au traité, en utilisant leur droit de véto.
Les Occidentaux ont-ils fait une mauvaise lecture du rapport de force?
Sans doute ont-ils espéré jusqu'à la dernière minute que l'Inde, à défaut d'accepter le traité, se contenterait de s'abstenir. Ils n'ont pas voulu voir que New Delhi était prêt à endosser la responsabilité d'un échec. S'ils avaient mieux décrypté la position indienne, ils n'auraient pas dû faire de l'acceptation du traité par les trois pays proches du seuil nucléaire (Inde, Pakistan, Israël), une condition sine qua non de l'entrée en vigueur du CTBT. Les Américains, et vraisemblablement les Français, étaient du reste tout prêts à accepter cette solution. En fait, la Russie, la Chine et la Grande-Bretagne se sont retranchées derrière la position intransigeante de l'Inde pour durcir leur position. Le fond de l'affaire tient au fait qu'au sein même des cinq puissances nucléaires (Etats-Unis, Russie, Chine, France,