Les chiffres les plus récents du Census Bureau sur l'évolution et la répartition des revenus des Américains font état d'un léger resserrement des inégalités en 1995, pour la première fois depuis 1990 et en opposition apparente avec une évolution qui durait depuis 1968. Il est bien sûr trop tôt pour dire s'il s'agit de l'amorce d'une tendance, ou si ce n'est qu'une aberration dans un «trend» historique qui avait vu les Etats-Unis retrouver dès 1982 le niveau d'inégalité de 1947. Le fossé, depuis, n'a cessé de se creuser. Dans l'immédiat, c'est le quasi-plein emploi que connaissent les Etats-Unis et la croissance soutenue de leur économie depuis 1992 qui expliquent cette bonne surprise pour Clinton. Le président actuel avait bâti l'essentiel de sa campagne victorieuse, il y a quatre ans, sur sa dénonciation enflammée des «reaganomics» qui avaient augmenté les revenus des riches et diminué ceux des autres. Mais depuis quatre ans, Clinton n'avait pu faire autre chose qu'observer l'accroissement des inégalités, sans pouvoir améliorer le sort de la grande «classe moyenne», la véritable ossature de l'Amérique, ou sans influencer le sort des plus pauvres.
On l'oublie souvent: la bonne santé actuelle de l'économie américaine s'appuie sur une longue phase de stagnation ou de diminution des revenus réels hors inflation des Américains. Sur la période 1989-1994, le salaire médian des familles (la moitié gagne plus, l'autre gagne moins) a baissé de 5,2%. Et si, dans les années 80, les