Une route, un pont, un fouillis d'arbres, et derrière, les premières
maisons de Kamanyola. Il suffirait de quelques pas pour atteindre ce bourg situé à 60 kilomètres au sud de Bukavu. Aucun militaire ou douanier zaïrois en vue. Kamanyola est aux mains des Banyamulenges, des Tutsis du Sud-Kivu installés depuis des générations au Zaïre qui ont pris les armes pour se défendre contre l'épuration ethnique. Il suffirait de quelques pas pour passer la frontière. Mais côté Rwanda, à une dizaine de mètres du poste-frontière, une ficelle et quelques militaires barrent la route. Le fonctionnaire de l'immigration refuse de regarder les papiers officiels, intime l'ordre de rebrousser chemin. Le ton monte très vite. Impossible de passer. Un peu plus au nord, en face de Bukavu, une équipe de télévision filme des réfugiés qui viennent de franchir le pont. Tout d'un coup, c'est la panique, les militaires foncent sur eux, tentent d'arracher la caméra. Prétexte à l'intimidation, un militaire serait passé devant l'objectif.
Tout en accusant la communauté internationale et les médias de ne s'intéresser qu'à l'aspect humanitaire du conflit de l'Est zaïrois, les autorités rwandaises leur interdisent soigneusement de voir autre chose que des réfugiés. Que les frontières soient fermées pour se protéger ou contrôler les entrées relève de la sécurité nationale. Interdire à ceux qui le souhaitent de passer la frontière rwandaise pour témoigner sur un conflit, dont le gouvernement de Kigali répète qu'i