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La vaine résistance d'un monastère en Algérie

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Les sept moines français deTibéhirine refusaient d'abandonner leur mission. Ils sont assassinés à l'arme blanche.
Photo non datée de six des sept moines de Tibéhirine, en Algérie, kidnappés et assassinés en 1996 (Photo AFP)
publié le 2 janvier 1997 à 16h35

C'est l'endroit où la route qui vient d'Alger s'apprête à bifurquer vers les premiers faubourgs de Médéa. La côte monte jusqu'à une station d'essence, d'où on aperçoit, à peine plus loin, le barrage de l'armée. La découverte a eu lieu là, au milieu des derniers champs qui bordent la ville. Trois têtes d'hommes posées sur les branches d'un arbre. Les quatre autres ont été trouvées par les militaires, juste à côté, après que l'alarme eut été donnée. Ces sept dépouilles mutilées restent encore aujourd'hui le seul élément tangible dans le dossier des moines français, enlevés deux mois auparavant à Notre-Dame-de-l'Atlas.

Le monastère surplombe le hameau de Tibéhirine, juste de l'autre côté de Médéa, là où s'ouvrent les gorges de la Chiffa. «Dans notre village, pas un homme mort, pas un homme en prison, pas un homme dans le maquis. C'est un record», explique un paysan. Il se reprend: «Enfin, c'était un record. On disait aux moines: "C'est grâce à vous que nous sommes épargnés.» Grâce à frère Luc, surtout, affirme la légende. Parmi les sept moines de Tibéhirine, celui-là est médecin. Dans ce pays où on passe une petite annonce pour trouver un médicament, il est plus sûrement approvisionné que n'importe quel dispensaire du secteur. Il dort entouré de ses stocks. Le jour, pendant les consultations, il les distribue gratuitement.

Parfois, les autres moines l'engueulent. «Frère Luc, la charité, cela ne se fait plus. Il faut être moderne.» Lui peste et jure. De