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Libération

La frénésie de civisme tchétchèneComme un pied de nez à Moscou, les réfugiés ont voté en masse hier.

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publié le 28 janvier 1997 à 15h16

Guekhzer envoyé spécial

Les portes de l'école ne sont pas encore ouvertes, que, déjà, les premiers autobus se rangent sur la place. Ce sont de vieilles guimbardes qui patinent laborieusement sur la neige dans un panache de brouillard noir. Mais leur calandre hérissée de drapeaux, les vitres couvertes par les portraits des candidats, feraient presque oublier leur aspect déglingué. D'ailleurs, qu'importe? Chez les réfugiés tchétchènes, l'heure est à la fête, pas au maquignonnage. Ils sont partis aux aurores du Daghestan voisin de peur de manquer ces premières élections d'après-guerre. Et ils auraient fait le chemin en carriole pour assouvir leur frénésie de civisme. «Voilà deux ans qu'on attendait ce jour, claironne Tamara, combien de pères, de maris ou de fils avons-nous dû pleurer? Deux ans de peine et de combats pour gagner le droit de choisir librement notre Président, notre Parlement, sans que Moscou s'immisce dans nos affaires. Je n'aurais voulu rater ça pour rien au monde.» Navettes gratuites. Flot continu, tout à la fois joyeux et solennel, la diaspora tchétchène se presse en bon ordre devant le bureau de vote de Guekhzer, installé spécialement à son attention, dans ce petit village frontalier. «Il était hors de question d'organiser cette consultation hors du territoire libéré de Tchétchénie, plaide Moumadi Saïdaïev, président de la commission électorale centrale, et certainement pas en Russie. A moins que Moscou reconnaisse notre indépendance et nous permette d'ouvrir