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Libération

A Kinshasa, des rumeurs pour combler le vide du pouvoirLivrée aux bandits, la capitale zaïroise s'attend au pire.

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publié le 24 mars 1997 à 22h23

Kinshasa envoyée spéciale

Une rumeur, bientôt un chant, des pieds nus qui martèlent le sol. Une petite troupe d'adolescents traverse le centre-ville au pas de course. Il est 7 heures du matin, trop tard pour les pilleurs. Ceux-là sont les nouvelles recrues que Kinshasa envoie combattre les troupes aguerries de Laurent-Désiré Kabila. Pour une prime de moins d'un dollar, ils partent vers un front toujours mouvant, défendre un régime moribond. Quelques billets à l'effigie du président Mobutu pour fuir la misère et la peur. Désespoir. La capitale zaïroise vit dans l'attente du pire. On stocke ce qui peut se conserver, et le prix des denrées alimentaires a augmenté. Ceux qui n'ont pas pu ou pas voulu fuir à l'étranger circulent le moins possible. La nuit kinoise, autrefois réputée dans toute l'Afrique, appartient désormais aux bandits, miséreux et militaires rançonneurs. Hier, Mobutu, invisible depuis son retour vendredi à Kinshasa, s'est montré un court instant en public à l'occasion de la visite du vice-président sud-africain, Thabo Mbeki. Le temps de dire qu'il allait s'occuper «des intérêts supérieurs de la nation, l'unité et l'intégrité territoriales». Mais le désespoir et la télévision sont plus forts que le geste de courage physique d'un potentat malade. Ici, personne ne peut oublier qu'«à la télé, le même soir, on a vu le chef rebelle, et on n'a pas vu le chef d'Etat». Les caméras ont en revanche filmé les dignitaires et ministres du régime, au premier rang desquels Ken