Kinshasa envoyé spécial
Le lieutenant-colonel Joseph est un homme «atterré» par la situation. Brillant pilote de chasse, formé sur une base yougoslave, il vit à terre, près de l'aéroport, au camp des Forces aériennes zaïroises, qui ne disposent plus d'aucun zinc depuis plusieurs années. Manque d'entretien, pénurie de kérosène s'ajoutent à un trafic de pièces détachées dans des hangars délabrés. Pas de vol: pas de solde, l'aviateur s'est donc recyclé en «missions d'interventions terrestres». De quoi s'agit-il? La semaine dernière, il s'est rendu avec un négociant de son quartier aux douanes du bac de Brazzaville pour accélérer, grâce à l'autorité de son grade, le déblocage d'une cargaison. Un autre jour, il accompagne un ami taxi à la préfecture pour récupérer sa carte grise confisquée... Entre deux missions, Joseph traîne sur sa base à regarder les long-courriers étrangers, et dans les cafés où il vit de ses modestes «cadeaux».
Individus suspects. L'adjudant-chef «Jordan», surnom que lui vaut sa taille de basketteur, ne bénéficie pas de ces privilèges d'officier. Lui se «débrouille» autrement. Lorsqu'il quitte le service, il revêt son uniforme de «non-apparent»: jean et chemise à fleurs. Avec trois potes, il sillonne en bagnole les boulevards et interpelle des individus suspects: photographes, femmes seules, chauffeurs de camionnettes, avec sa carte «de la Sécurité sociale militaire» et sa Kalachnikov. Il inspecte les sacoches et fouille les sacs à main. Les Kinois les appell