Istanbul, de notre correspondant.
La haute administration et l'armée, traditionnels défenseurs de la laïcité héritée de Mustafa Kemal, semblent bien décidées à mettre la pression maximale pour bouter hors du pouvoir le Refah (Parti de la prospérité, islamiste) de Necmettin Erbakan, premier Premier ministre islamiste en soixante-dix ans de République. Le procureur général de la Cour de cassation, Vural Savas, a annoncé, hier à Ankara, avoir saisi la Cour constitutionnelle pour demander l'interdiction de ce parti pour activités antilaïques.
Arrivé en tête avec 21% des voix lors des élections législatives du 24 décembre 1995, le Refah avait, six mois plus tard, réussi à s'installer au pouvoir en formant une coalition avec le DYP (Parti de la juste voie, droite conservatrice) de Tansu Ciller. Le long bras de fer entre le camp laïc et les islamistes arrive ainsi à une étape décisive après l'échec, mardi, d'une nouvelle tentative pour renverser le gouvernement islamo-conservateur par une motion de censure repoussée par 271 voix contre 265 au Parlement. «L'heure des comptes arrive. Le conflit entre l'armée et le Refah est arrivé à un tel point que, d'ici quelques jours ou quelques semaines, l'un des deux devra capituler et nul ne doute que ce seront les islamistes qui devront jeter l'éponge», souligne Ali Sirmen, écrivain et «kémaliste» de toujours. L'armée a maintenu, malgré le refus du gouvernement, les manoeuvres navales avec Israël et les Etats-Unis, prévues pour le mois de juin