Kinshasa envoyé spécial
A la première gaffe, Prudence, de l'association des mamas/maraîchères de la zone Galima, hoche la tête: «Vraiment, cet homme rouge, ils l'ont laissé bouillir trop longtemps sous le soleil.» L'homme rouge, procureur de la Cour suprême, vient d'appeler le président Kabila par le prénom Joseph-Désiré celui du Maréchal Mobutu au lieu de Laurent-Désiré! A la deuxième bourde, quand le président de la Cour surprême évoque la république démocratique du Zaïre au lieu du Congo, Cécile, du quartier Beaumarchais, soupire: «Mon Dieu, mon Dieu! Ceux-là, il faudra qu'ils apprennent à travailler à zéro.» Au même moment, les étudiants et sympathisants d'Etienne Tshisekedi, l'opposant d'hier et d'aujourd'hui, ne ratent pas l'occasion de se gondoler et entament leurs chants contestataires. Personne ne leur en veut vraiment, car sans eux, le gigantesque stade Kamanyola serait aux deux tiers vide. 30 000 Kinois endimanchés et 10 000 étudiants frondeurs assistent à la cérémonie d'investiture de «Son Excellence» Kabila. Affluence moindre que celle de Lubumbashi.
Kabila, bonhomme rondouillard, vêtu d'un costume noir, dans une immobilité de roi africain sur son fauteuil Louis XVI drapé de velours grenat, ne bronche pas à ces anicroches. Lui-même s'est permis une maladresse ubuesque un instant plus tôt. Mais surtout, depuis trente ans qu'il attend, rien, ni les chahuts estudiantins dans les gradins, ni les couacs de l'orchestre, ni les bévues de magistrats dégoulinants de pe