Mitidja envoyé spécial
Ici s'arrête la ville et commence la campagne. Une lisière plus qu'une rupture, dans cette région où la limite entre l'urbain et le rural reste mal définie. En deçà de la voie ferrée, s'alignent masures et lotissements, quelques immeubles sans caractère, bas et carrés, balcons enguirlandés de cordes à linge. Au-delà des rails, s'étendent les orangeraies, vergers immenses qui courent jusqu'aux premiers contreforts de l'Atlas blidéen, repaire des Groupes armés islamistes. «Nous les avons repoussés dans le Djebel, assure Zoubir, la pétoire d'un autre âge en bretelle à l'épaule. Depuis qu'on a pris les fusils, ils ne viennent plus qu'à la nuit. Mais jusqu'à l'année dernière, leur camp était installé derrière ces arbres.» La pierre usée d'une vieille ferme coloniale porte encore, gravé, le nom des anciens propriétaires: «Coudray Frères». Zoubir s'assoit sous une marquise envahie par le liseron pour raconter sa guerre, sa révolte, ses désenchantements et sa lassitude. Epicier aux heures ouvrables, milicien sur son temps libre, il fut d'abord séduit par l'islamisme. Tout comme l'immense majorité de ses voisins, paysans traditionalistes, pieux et conservateurs. «Aux municipales de 1989, puis aux législatives de 1991, on a voté pour le Front islamiste du salut. Contre le parti unique. On voulait le changement.» Le FIS, dissous en 1992, trouve là un terrain de choix pour entamer sa lutte clandestine. Beriane, faubourg de Boufarik, lui est totalement acquis.
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