Rio de Janeiro correspondance
José Rainha tient à la fois du hors-la-loi et du justicier. Cela dépend de quel côté de la société brésilienne on se trouve. Pour les grands propriétaires terriens, ce leader du Mouvement des paysans sans terre (MST), qui a conduit de nombreuses invasions de fazendas (ranches), est un démon. «Une menace à la société, à la famille», comme plaidera l'avocat de l'accusation, au cours du procès qui s'est achevé en milieu de semaine par une condamnation à vingt-six ans de prison pour complicité de meurtre.
Pour les sans-terre, ce barbu grand et maigre de 36 ans est un héros, un homme sorti des champs, un militant féroce de la réforme agraire. «Mon unique crime, dira Rainha, est de lutter pour un morceau de terre, un morceau de pain, pour que nos fils ne soient pas des bandits. Si cela est hors la loi, alors je le resterai.» Pour le reste, le charismatique leader a toujours nié toute participation à l'invasion en 1989 de la fazenda Ipuera, dans l'Etat d'Espirito Santo, au cours de laquelle le propriétaire et un policier avaient été abattus. Mais c'est un symbole que la cour a jugé" Rainha, littéralement «la reine».
L'opinion partagée. Le procès a en fait reflété le bras de fer entre grands propriétaires et le Mouvement des sans-terre. Les premiers, qui appartiennent à l'oligarchie du Brésil, dominent la police et la justice. Les va-nu-pieds comptent sur leur détermination et sur l'opinion publique. Mais l'onde favorable aux sans-terre qui avait traversé