Parral, envoyé spécial.
C'est un trou de verdure où chante une rivière" Le long de la route, des champs bien tenus côtoient une petite école; un vieux car Mercedes s'arrête devant l'entrée pour laisser descendre les élèves, des enfants d'ouvriers agricoles. Au loin, les contreforts boisés de la cordillère des Andes ondulent vers la frontière argentine. Ce merveilleux domaine de 15 000 hectares, sis à 300 kilomètres au sud de Santiago, près de la bourgade de Parral (voir carte), inspirerait un poème bucolique, s'il n'y avait le reste" Et d'abord le dense réseau de barbelés, hauts de plus de deux mètres, qui entourent l'enceinte de Villa Baviera, la vaste exploitation où se sont installés, en 1961, quelque 250 immigrés allemands, tous membres de la «société de bienfaisance Dignidad (dignité)». Le fronton chapeautant le portail principal, évocateur de camps de sinistre mémoire, proclame que «la vérité demeure pour l'éternité».
La vérité, «c'est que nous sommes victimes d'un complot subversif ourdi depuis longtemps», affirme, dans un espagnol heurté, le robuste gaillard posté à l'une des entrées. Ce complot, à l'en croire, tendrait ses fils jusqu'à la justice chilienne, qui a lancé un mandat d'arrêt contre le fondateur de la colonie, Paul Schäfer, accusé du viol de plusieurs jeunes garçons de la région. Or, cet homme de 76 ans refuse de se livrer aux autorités, «car la police a l'intention de le tuer». Depuis que le gourou de Dignidad fait de la résistance, la presse assiège Villa