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Libération

Bosnie-Herzegovine: une unite de façade. Timbres, passeports, monnaies: les entités bosniaques se distinguent.

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publié le 6 août 1997 à 7h51

Sarajevo envoyé spécial

Les accords de paix de Dayton ont théoriquement reconnu la Bosnie-Herzégovine comme un seul et unique pays. Vous souhaitez envoyer une carte postale à une amie habitant Prijedor, en zone serbe. Vous l'adressez donc à Prijedor, Bosnie-Herzégovine. Votre carte se perdra à Sarajevo, sous un immense tas de lettres et de paquets qui ne seront jamais distribués en zone serbe, faute de facteurs. Par contre, si vous adressez la carte à Prijedor, Republika Srpska, elle transitera par Belgrade et parviendra à sa destinataire. L'envoi gagnera un jour si, par zèle, vous écrivez sur l'enveloppe en cyrillique. Si votre amie vous répond en collant un timbre de Bosnie-Herzégovine sur sa lettre, celle-ci n'ira pas plus loin que la poubelle du bureau de poste de Prijedor. Du reste, la postière de Prijedor ­ elle le dit sans ambages ­ jette tout courrier non écrit en cyrillique. Donc, collez un timbre bosniaque en Bosnie musulmane, un timbre croate en Herzégovine, un timbre serbe en Bosnie serbe.

Les cartes postales ne circulent pas entre les régions, les individus guère plus. Hormis sur des axes routiers fréquentés par un incessant trafic étranger et protégés par les troupes de la Sfor. Le quadrillage policier, plus serré en Bosnie serbe, dissuade en effet des velléités de visites. L'obstacle le plus important est la plaque d'immatriculation qui désigne l'origine des automobilistes: le damier blanc et rouge des plaques croates, la fleur de lys bleue des plaques musulmane