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Libération

La République serbe sombre dans la misèreCoupés du monde, les habitants survivent entre chômage et trafics.

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publié le 9 août 1997 à 7h41

Foça envoyé spécial

A l'Est de la Bosnie, trois villes, Visegrad, Gorazde, Foça, se succèdent le long de la Drina; autrefois nouées entre elles grâce aux familles, au commerce ou à la littérature. La guerre les a séparées, qui assignait Visegrad et Foça en Bosnie serbe, et Gorazde en Bosnie fédérale. Désormais aucun Bosniaque n'emprunte plus les 75km de route qui les relient entre elles. L'étranger qui le fait est dépaysé au premier regard. Par les boutiques: neuves, modernes à Gorazde, poussiéreuses et anémiées à Visegrad et Foça. Les terrasses estivales: rurales à Visegrad ou Foça, kitch, bariolées et techno à Gorazde. Les modèles de voitures dans les rues: européennes là, yougoslaves et fumantes ici. Mais surtout par les gens, leurs habits, leurs regards. La Bosnie serbe sombre dans la pauvreté, cela saute aux yeux.

Trois bistrots se côtoient sur la place de Foça. Au Cyp, on écoute des chansons traditionnelles serbes, on boit une bière du Monténégro, de l'eau de vie de prune ou du café turc. La plupart des hommes portent des vestes de survêtement acryliques usagées, et sont des réfugiés. Dragan Ilic, lui, est natif de Foça. Dans son appartement de trois pièces d'une cité près du stade, le sourire édenté de son épouse Irena, la robe reprisée de la petite fille, la miche de pain rassis sur la table de la cuisine, le plastique aux fenêtres, et l'écran grésillant de la télévision noir et blanc ne trompent pas. Dragan a déjà vendu sa Zastava, puis un bout de terre familiale. Il