Kinshasa envoyé spécial
C'est juste à côté du palais du Peuple, l'un des ces bunkers en béton dont la coopération chinoise a gratifié bon nombre des capitales du continent. Sur la gauche de l'immense et austère bâtisse, derrière le grillage qui permet d'en rendre la fréquentation payante, le nouveau régime a ouvert une «kermesse». En fait, hormis quelques échoppes vendant friture, pop corn et colifichets, entre la très locale «Maman la Grâce» et le bijoutier sénégalais «Fall la Girafe», s'alignent indiquées par des panneaux sept «rues» de débits de boissons. Dans chacune, des tables et des chaises en plastique blanc se succèdent sur trente mètres environ, et, n'étaient-ce les mille rythmes d'une tropicale sarabande, on se croirait à une fête de la bière allemande. Mais ici, une bouteille à la main et une fille à portée de l'autre, ce sont les soldats de Laurent-Désiré Kabila qui s'enivrent le soir venu. Surtout ceux qui ne sentent pas à l'aise pour arroser leur victoire dans les grouillants quartiers de Kinshasa: les «petits hommes verts» en uniforme, ces «extraterrestres» que les gens prudents, pour ne pas parler de Tutsis, d'Ougandais ou de Rwandais, appellent aussi des «militaires de souche nilotique»" Racket. Ils posent problème même si, selon un ministre qui ne veut pas «être cité à ce sujet», ils ne représentent qu'un «petit tiers» des quelque 12 000 ex-rebelles à Kinshasa. Près de trois mois après leur arrivée, ce sont toujours eux, seuls, qui disposent de moyens