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Libération

Les charters de la peur des refugiés rwandais. Ils sont renvoyés à Kigali, où sont basées les troupes qu'ils ont fuies.

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publié le 18 août 1997 à 7h25

Mbandaka envoyé spécial

Rouillée de l'étrave à l'étambot, munie d'un seul pont sur une cale longue de quinze mètres, la barcasse glisse sur les eaux limoneuses de l'un des innombrables affluents du Congo que deux moteurs hors-bord moulinent, en gargouillant, depuis six jours. Tout près du but, un cantique s'élance du fond de cette pirogue de fer, un psaume repris par 206 passagers assis en rangs serrés, incapables de se lever, les enfants grimpant sur les corps mêlés et, aussi, sur la bâche bleue enroulée qui, près du fût de carburant, contient un mort. C'est le second depuis le début du voyage à Bokote, quelque 300 km à l'est, dans l'intérieur du pays. Le premier, avant-hier, a finalement été enterré après de longues tractations avec des pêcheurs ne voulant pas que, dans leur village, un «Rwandais souille la terre». Il a fallu payer. En arrivant à Mbandaka, d'où ils devront être rapatriés, les 206 rescapés de neuf mois d'errance dans la jungle crient d'un filet de voix leur espoir que «Dieu conduira son peuple en Terre promise», que «la foi fera sauter les portes de prison».

Bible. Dans le port fluvial de Mbandaka, entre rafiots désaffectés et entrepôts bâillant sur le vide, le Haut-Commissariat aux réfugiés (HCR) reçoit les Hutus rwandais ayant fui, depuis l'automne dernier, à travers tout l'ex-Zaïre. Les plus vaillants montent sur des camions, un baluchon à la main ou agrippés à l'ultime objet précieux qui leur reste, une Bible souvent. Ils sont transférés dans un camp de t