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Libération

Suède: L'eugènisme des sociaux-démocrates.

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De 1935 à 1976, 62 000 personnes (malades, asociaux...) stérilisées.
publié le 26 août 1997 à 7h06

Cette année-là, la Suède était gouvernée par Tage Erlander, le père de la social-démocratie. Au pouvoir depuis 1932, les sociaux-démocrates donnaient à l'Europe d'après-guerre l'image d'un pays où il faisait bon vivre. Etat providence et égalité entre les sexes. C'était en 1953. Cette année-là, le jeune Niels, âgé de 16 ans, était stérilisé contre sa volonté. L'Institut national de la médecine avait tranché, Niels était «sexuellement dérangé». Plus tard, on apprit par son dossier qu'il n'était pas «suédois de pure race». La pureté de la race suédoise était définie depuis 1922 à partir de planches à dessin livrées par l'Institut de biologie raciale d'Uppsala.

«Mauvaise haleine.» Ainsi commence la formidable enquête de Maciej Zaremba, publiée les 20 et 21 août dans le quotidien suédois Dagens Nyheter, sur l'un des aspects les plus ambigus de la démocratie suédoise. Entre 1935 et 1976, plus de 62 000 personnes, majoritairement des femmes, ont été stérilisées sur décision officielle. «Volontaires» dans la terminologie, certains d'entre eux ont dû signer des autorisations écrites sous peine de se voire retirer leurs autres enfants. Les personnes désignées étaient des handicapés, des malades, ainsi que des personnes en parfaite santé, des orphelins, des femmes dont on estimait qu'elles avaient trop d'enfants ou qu'elles étaient de «mauvaise vie». «Elle est sale, elle a du vernis rouge sur les ongles, son haleine sent aussi très mauvais», peut-on lire dans une deman