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Libération
Reportage

Bosnie: le vote des «absents» de Brcko. Nostalgie et amertume des réfugiés musulmans revenus pour un jour.

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publié le 15 septembre 1997 à 8h08

Brcko envoyé spécial,

Edina a passé sa plus belle robe et endimanché les enfants. Fezula, son mari, a copieusement lesté une besace de victuailles. Puis, couverture sous le bras, les Eminovic s'en sont allés voter, se jurant bien de profiter de l'occasion pour pique-niquer dans le jardin de leur ancienne maison. Journée intense d'émotions contrastées. Les ruines du pavillon familial se dressent à quelques dizaines de mètres du centre électoral réservé aux Musulmans de Brcko. «Notre foyer, le petit dernier ne l'a même jamais vu, soupire la mère, nous sommes partis en 1992, et il n'a que 3 ans.» Né dans l'exode, le gamin a grandi dans les centres de réfugiés où se sont entassés les habitants de Brod, chassés de leur quartier, au début de la guerre, par les milices nationalistes serbes. Aujourd'hui, sous la vigilance des soldats américains, ils repassent pour la première fois cette ligne de front qui fut l'une des plus sanglantes du conflit.

Pourtant, pour les électeurs du bureau 999, ce retour tant attendu, loin d'apaiser les rancoeurs, ajoute à l'amertume. Tous savent que, leur bulletin déposé dans l'urne, il faudra abandonner une fois encore leur maison entraperçue comme dans un mirage. Et le déroulement même des élections se charge de leur rappeler le précaire de leur situation. Les représentants de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), en charge de la tenue du scrutin, auraient voulu faire la démonstration de la pérennité de la division ethniqu