Tokyo, 1973: Kim Dae-jung, opposant sud-coréen réfugié au Japon, est
enlevé par des hommes en imperméable, des agents de la KCIA, l'agence de renseignements de la junte sud-coréenne au pouvoir. Ligoté, bâillonné, le dissident est amené sur un bateau qui met le cap vers le large, attaché à une planche lestée. C'est alors qu'apparaît mystérieusement dans le ciel, au-dessus du navire, un hélicoptère de l'armée américaine" Sans qu'on sache pourquoi, l'opération est alors avortée. Kim Dae-jung est balancé trois jours plus tard devant chez lui, à Séoul, les yeux bandés" Embarrassée par le retentissement de cette affaire, la Corée du Sud envoie un émissaire pour s'excuser auprès du gouvernement japonais: il s'agit du Premier ministre, le colonel Kim Jong-pil" Les ennemis réconciliés. Presque vingt-cinq ans plus tard, on croit rêver à Séoul: la Corée du Sud s'apprête à élire à la présidence de la république le même Kim Dae-jung, dissident historique de ces trente dernières années, dont le gouvernement a plusieurs fois tenté, en vain donc, de se débarrasser. Tous les sondages le donnent gagnant à la présidentielle du 18 décembre. On croit rêver encore à Séoul en voyant deux anciens ennemis des années de braises s'allier pour conquérir le pouvoir: l'infatigable Kim Dae-jung a en effet reçu, cette semaine, le soutien crucial de l'ex-Premier ministre Kim Jong-pil, qui dirige aujourd'hui le Parti des libéraux démocrates. Agé de 71 ans, ce politicien ultra-orthodoxe orchestra le coup d'Eta