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Libération

L'île de Fidel Castro attend Jean Paul II mercredi. Cuba croit au pape et au dollar. Le régime prêche toujours le socialisme, mais la survie passe par le billet vert.

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publié le 17 janvier 1998 à 16h22

La Havane, envoyé spécial.

Dès l'arrivée à l'aéroport José Marti, les deux univers s'interpellent. Calligraphié en lettres énormes sur la façade, un slogan professe crânement qu'«ici, on croit en la révolution». Puis, dans les couloirs qui canalisent les voyageurs, des panneaux vantent en couleurs les trésors de l'île: du soleil, des cigares, du rhum et des jolies filles. Des militaires en uniformes vert olive examinent passeports et visas, mais, sitôt franchi le filtre policier, leur succèdent de jeunes hôtesses minijupées qui proposent la location de téléphones cellulaires made in USA. A la douane, il y a deux poids et deux mesures: alors que le touriste franchit l'obstacle avec des souhaits de bienvenue, on fouille méticuleusement les bagages des citoyens cubains ou de leurs cousins naturalisés américains de retour au pays. Ces derniers ont droit à vingt kilos de marchandises, pas un gramme ni un sourire de plus.

Cette dialectique du socialisme réel et du capitalisme consumériste est devenue un mode de survie. Le dollar, qui circule librement depuis trois ans, a adouci les frustrations nées de l'effondrement du bailleur de fonds soviétique. Castro avait alors instauré une économie de guerre (la «période spéciale en temps de paix») qui s'est traduite par une pénurie totale. Il n'y avait plus rien à manger, plus d'essence, plus d'autobus pour transporter les gens. Chasse aux dollars. Si les transports en commun sont toujours aussi défaillants, le carburant est désormais d