Le Cap, de notre correspondante.
Nimbée de nuages, la montagne de la Table domine l'horizon. Un paysage céleste reproduit à l'infini sur les cartes postales qui vantent la beauté de la ville du Cap, à l'extrême pointe du continent africain. Les plages de l'océan Atlantique et les villas victoriennes du centre-ville ont, depuis longtemps, forgé la réputation de la capitale parlementaire de l'Afrique du Sud. Mais, de l'autre côté de la montagne, se cache la face honteuse du Cap, l'envers du paradis: les Cape Flats, une succession de ghettos balayés par le vent dans une plaine sablonneuse. Cité-dortoir de 85 000 habitants, Manenberg appartient à cet ensemble hétéroclite de terrains vagues et d'immeubles aux façades lépreuses. Depuis le 9 février, Manenberg est en guerre. Les écoles et la bibliothèque ont fermé leurs portes, les taxis ne circulent plus, les ambulances sont placées sous escorte policière. L'armée a pris position aux principaux carrefours du ghetto, sans réussir pour autant à mettre un terme aux échanges de tirs.
Dérapage incontrôlable. Depuis longtemps, les gangs font la loi dans les ghettos du Cap. Les Hard Livings, les Sexy Boys, les Americans" leur influence s'étend sur l'ensemble des Cape Flats. Le 9 février, trois jeunes adolescents appartenant au gang des Clever Kids ont été enlevés, torturés et exécutés par les Hard Livings. Aussitôt Manenberg s'est enflammé. Une fois de plus, le dérapage a été incontrôlable. «Les gangs se battent pour le contrôle du trafic