Le bombardement de la ville d'Halabja a commencé à midi et demi, le
16 mars 1988, il y a tout juste dix ans. Ce n'était pas la première fois que cette localité kurde était la cible de l'aviation de Saddam Hussein. Le 26avril 1974, lors de l'écrasement d'une précédente révolte kurde, une quarantaine d'habitants avaient été tués et une centaine d'autres blessés par des raids aériens. Cette fois, le bombardement est plus intense et frappe quartier après quartier. C'est ce qui amène Ali Razgar, âgé à l'époque de 25 ans, à fuir avec sa famille et non pas à attendre la fin de l'attaque. Pari risqué puisqu'il lui faut partir sous les bombes mais qui lui sauve la vie. Réfugié dans le petit village tout proche d'Aba Obeida, situé sur une colline qui domine la ville, il assiste à la poursuite du pilonnage d'Halabja. Des fumées grises montent des incendies. Puis, d'autres, de couleur jaunâtre. Ali Razgar ne sait pas encore que la ville est alors bombardée à l'arme chimique depuis 15 heures. Le gaz employé est un «cocktail» de gaz moutarde (qui attaque les yeux, la peau, les membranes du nez, la gorge et les poumons), de sarin et de VX (lesquels détruisent le système nerveux).
Défaite majeure. Halabja est une grosse bourgade située à une trentaine de kilomètres de la frontière iranienne. Comme l'état-major irakien a décidé de vider les villages environnants de leur population et de les regrouper dans des baraquements autour de la ville, elle compte une cinquantaine de milliers d'habitant