La Havane envoyé spécial
«Comme résultat concret, c'est tout, mais ce n'est pas si mal.» Optimiste par principe, Elizardo Sanchez veut croire que le récent voyage du pape à Cuba a déjà porté quelques fruits. Dans sa petite maison familiale du quartier de Playa, où cet ancien professeur de marxisme à l'université de La Havane reconverti en défenseur des droits de l'homme reçoit amis, observateurs étrangers et journalistes, il dresse la comptabilité des grâces accordées par Fidel Castro à la demande de Jean Paul II: «Dix-huit personnes vont être expulsées vers le Canada, qui leur a accordé l'asile politique. Pour le moment, il y a eu 289 détenus effectivement libérés, dont 100 prisonniers pour raisons politiques. Il y en avait 482 au 1er janvier.»
Frigo russe vide. Les comptes de Rita (1), 42 ans, assistante sociale, divorcée et mère de deux grandes filles, sont plus vite faits: «Je n'ai plus droit qu'à douze oeufs par quinzaine au lieu de treize. A un seul poisson mensuel au lieu de deux. La dernière livraison de viande (une livre de steak haché «enrichi» de soja, ndlr) remonte à six semaines. Je n'ai touché en février ni savon corporel ni lessive. Je n'en peux plus.» Et d'ouvrir en ricanant son gros frigo russe: complètement vide, mises à part trois carafes d'eau. «Je ne suis pas croyante, je suis allée à la messe du pape parce que c'était un événement extraordinaire. Je m'étais dit ce jour-là: "Ne rêve pas, il ne va rien se passer, il n'y aura pas de miracle. Eh bien, il n'y